Une coalition mondiale des villes pour une politique d'accueil des migrants digne et juste

30/10/2017

Les 18 et 19 septembre derniers, j'étais invitée au 5ème sommet mondial des Elus locaux sur les migrations, l'accueil des réfugiés et le développement. Ce sommet était coorganisé par la Ville de New-York,  Concordia, l'Open Society Foundation et la Columbia University, en marge de l'Assemblée générale des Nations Unies.

Contexte

Le 19 septembre 2016, lors de l'Assemblée générale des Nations Unies, les 120 leaders nationaux se sont accordés pour relever les défis relatifs aux larges mouvements des réfugiés et migrants à travers le monde. Dans leurs conclusions, les pays ont adopté au consensus la « Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants ».  Cette déclaration, ce sont deux accords dsictincts mais reliés qui devront être développés par les Etats, d'une part sur « le partage des responsabilités en matière de réfugiés » et, d'autre part, pour « une migration sécure, ordonnée et régulière », le tout pour l'automne 2018.

La Déclaration de New York fait clairement référence au rôle des acteurs locaux en relation à la politique migratoire, avec la reconnaissance officielle par les Etats de la nécessité d'une coopération et d'un partenariat avec les autorités locales, reconnaissant « les besoins particuliers des autorités locales qui sont les premières portes d'entrée des migrants. »

Les villes sont les mieux placées pour comprendre leurs besoins spécifiques pour accueillir et accompagner les populations migrantes et réfugiées, les deux dans le respect des contextes humanitaires et de l'intégration sociale à long terme. Cependant jusqu'il y a peu les villes ont été exclues des débats nationaux et internationaux où les politiques migratoires ont été formulées.

Le 5ème Sommet des Maires et Maires-Adjoints sur les migrations

L'objectif de ces sommets est de faire monter en puissance l'avis des Villes sur les questions de migrations, à l'instar de ce qui s'est fait sur le Climat pour faire bouger les Etats Nationaux et arriver à des décisions ambitieuses et progressistes.

Le sommet mondial des élus locaux permet aux leaders des villes d'informer les décideurs nationaux et internationaux de leurs perspectives et priorités sur ces politiques, amenant leurs voix dans l'arène internationale et les engageant dans le cadre de ces deux accords de la Déclaration de New York.

L'objectif de ces sommets est de faire monter en puissance l'avis des Villes sur les questions de migrations, à l'instar de ce qui s'est fait sur le Climat pour faire bouger les Etats Nationaux et arriver à des décisions ambitieuses (et progressistes).

Le premier sommet a eu lieu à Barcelone en 2014 et avait abouti à une première déclaration de principes, le second a eu lieu à Quito en 2015 et avait abouti à un agenda local sur les Migrations et le Développement, en septembre 2016 à Quezon city, le sommet avait conclu sur un « engagement à l'action ». Depuis, la crise de l'accueil des réfugiés ayant encore enflé, et suite à la Déclaration de New York lors de l'Assemblée générale des Nations Unies de 2016, un 4ème sommet s'est tenu en juin 2016 à Berlin et a abouti à une déclaration signée par 40 maires et maires-adjoints présents. Et enfin, le dernier a eu lieu à New-York les 18 et 19 septembre.

Au programme de ce  5ème Sommet

Les villes sont depuis toujours des lieux de migrations. Ces migrations augmentent la diversité mais aussi l'innovation communautaire qui définit la vie de la cité. Mais ces migrations exigent aussi de la part des autorités locales des réponses politiques complexes pour être au service de tous les citoyens. Les villes agissent souvent en première ligne pour rencontrer les besoins des primo-arrivants et des réfugiés. Elles sont au premier rang de la création des politiques urbaines de long terme qui stimulent la diversité et l'inclusion.

Le 5ème Sommet mondial des maires et maires-adjoints a invité les leaders municipaux, la société civile et les leaders d'opinion internationaux à discuter de la façon dont les villes surmontent les obstacles pour implémenter des politiques qui promeuvent l'intégration des migrants et des réfugiés, la protection de leurs droit et la question de leur empowerment. De telles politiques sont considérées comme absolument fondamentales pour permettre l'intégration sociale.

Je me suis sentie revigorée par le discours extrêmement offensif en faveur des migrants de la part de tous ces leaders internationaux. J'ai perçu chez eux une volonté sincère de faire des villes leurs alliés pour faire bouger l'opinion publique et les gouvernements nationaux.

Les discussions ont souligné comment, en s'attelant à la cohésion sociale, les villes peuvent influencer sur le discours national sur les migrations et l'inclusion sociale, en démontrant la forcer et la richesse qui résultent d'un pluralisme inclusif. En outre, comme dans d'autres domaines de la politique internationale, les villes collaborent de plus en plus au-delà des frontières nationales : en partageant les idées, en formant des coalitions, et en défiant leurs gouvernements nationaux pour qu'ils adoptent des politiques qui ont fait leurs preuves au niveau local.

Le Sommet a mis en lumière le rôle du partenariat, notamment les réseaux des villes, mais aussi les partenariats public-privé, en mettant en avant les objectifs déterminés par les villes pour relever le défi de la migration mondiale.

Le sommet s'est divisé en trois parties :

1/ Rencontre en marge de l'AG des NU avec des représentants de gouvernements nationaux et des leaders d'opinion mondiaux

En marge de l'Assemblée des Nations Unies, les élus locaux ont discuté avec des représentants des gouvernements nationaux et des leaders mondiaux, des solutions locales et des opportunités au niveau local pour relever les défis mondiaux des migrations et de l'accueil des réfugiés

Marie Harbour au Sommet Mondial des élus locaux
Marie Harbour au Sommet Mondial des élus locaux

Représentants des NU et associations internationales : notamment Louise Arbour (ancienne procureur au TPI pour l'ex-Yougoslavie et Rwanda, ancienne haute commissaire des NU pour les droits de l'homme, actuelle représentante spéciale du Secrétaire Général des NU pour la migration), Mary Robinson, ancienne présidente de l'Irlande et ancienne haute commissaire des Nu pour les droits de l' homme, elle est actuellement membre du groupe Elders, créé par Nelson Mandela pour promouvoir la paix et les droits de l'homme dans le monde), IPI (institut de recherche indépendant spécialisé dans l'approche multilatérale sur les questions de paix et sécurité qui travaille étroitement avec les NU), représentants permanents de la Suisse et du Mexique auprès des NU, Filippo Grandi (HCR)

Je me suis sentie revigorée par le discours extrêmement offensif en faveur des migrants de la part de tous ces leaders internationaux. J'ai perçu chez eux une volonté sincère de faire des villes leurs alliés pour faire bouger l'opinion publique et les gouvernements nationaux.

2/ Rencontre avec la société civile et le secteur privé

une rencontre de brainstorming entre élus locaux, société civile et secteur privé a permis de mettre en lumière toute une série d'initiatives existantes, souvent multidisciplinaires et en partenariat.

Le représentant de la ville de Barcelone a ainsi exposé comment, avec la société civile, ils avaient élaboré tout un plan de communication et sensibilisation pour casser les préjugés sur les migrants. Parmi les différents outils présentés, il y avait ce set de table distribué dans le secteur horeca. Plutôt que d'y trouver de la publicité, on y trouve une communication positive sur les réfugiés.

Le maire de la ville de Altena, en Allemagne, a expliqué combien la mobilisation de la société civile avait été déterminante dans la prise de décision de Angela Merkel.

A New York, un véritable partenariat public-privé a permis de rendre les bibliothèques publiques des différents quartiers plus accessibles aux populations issues de l'immigration. Leur taux de fréquentation  a explosé.

3/ une matinée de travail entre élus locaux 

Cette matinée de travail a permis de continuer d'échanger sur les bonnes pratiques des uns et des autres.

Pour ma part, je retiens les efforts faits par la ville de Los Angeles en matière de police. En quelques années, ils ont réussi à faire en sorte que plus de 50% des agents de police sont issus des différentes minorités culturelles. Ils ont aussi élaboré un programme social sur base volontaire avec la police. Les agents de police qui le souhaitent,après leurs heures de travail, vont animer quelques heures sur les agoras spaces. Ils sont en civil, mais ne cachent pas pour autant leur métier. Ils donnent des animations sportives aux jeunes des quartiers populaires. Ce programme a permis, semble-t-il d'améliorer sensiblement les relations entre les jeunes et la police.

Et après

Ce que je retiens de ce sommet, c'est tout d'abord qu'aux USA, un grand nombre de villes et d'acteurs de la société civile se sont mobilisés contre les nouvelles décisions de Trump en matière de politiques migratoires.

Ce qui m'a encore plus touchée, c'est de voir le MET (Metropolitan Museum of art), un des plus grands musées au monde se positionner en faveur des migrants et des réfugiés.

Les villes ont en effet autorité sur la police locale. Elles ont donc décidé de ne pas appliquer les décisions de Trump, de ne pas pourchasser les migrants, malgré les menaces de l'Etat fédéral de couper dans les subsides. Ces vilels sont aujourd'hui appelées villes Sanctuaires. Leurs maires ont un discours offensif en faveur des migrants qui fait du bien à mes oreilles d'Européenne. Sur ces enjeux-là, (moins bien sûr sur les enjeux socio-économiques), on ne peut qu'espérer que les dirigeants des villes européennes en prennent de la graine.

Au Musée de Ellis Island
Au Musée de Ellis Island

Il est vrai que l'histoire des Etats-Unis en matière de migrations est autre, la grande majorité des Américains ayant une histoire de migration. A New York, il suffit de voir le musée de Ellis Island qui rend hommage aux différents migrants qui ont débarqué, parfois après un voyage difficile, aux Etats-Unis.

Mais ce qui m'a encore plus touchée, c'est de voir le MET (Metropolitan Museum of art), un des plus grands musées au monde se positionner en faveur des migrants et des réfugiés. Dans quasi toutes leurs salles, ils ont décidé d'exposer, aux côtés des grands noms d'artistes américains et européens, des artistes en provenance de pays qui sont sur la liste noire des USA, comme le montre la photo ci-dessous.

De retour à Bruxelles, il s'agit maintenant de faire monter petit à petit la voix des villes en faveur d'un accueil digne et juste des migrants et des réfugiés. Je salue ainsi l'initiative du CNCD qui a lancé sa campagne "Commune hospitalière".

Pour ma part, je prépare une note avec quelques propositions qui sera soumise au Collège. Par ailleurs, j'assisterai les 16 et 17 novembre prochains à une conférence organisée en Belgique par le Gouvernement fédéral et l'OIM sur ce fameux accord de la Déclaration de New York. Cela me permettra de voir si le Gouvernement fédéral est réellement prêt à associer les villes ou pas... J'y reviendrai bientôt.

Molenbeek, miroir du Monde | Au coeur d'une action politique | Sarah Turine
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